Skip to content

La maintenance aéronautique en ébullition


Sous la pression de quel lobby, la Commission europenne sest elle penche sur la concurrence sans piti que se livrent les constructeurs aronautiques (avionneurs, motoristes et quipementiers OEM) et les compagnies ariennes ? Pour lheure linformation na pas filtr.

Il est probable cependant que ce soient les compagnies ariennes qui sont derrire cette action engage par Bruxelles. Pourtant la tendance nest pas rcente.

Depuis lorigine de laviation commerciale, la maintenance (qui se rsumait alors la rparation) tait laffaire des compagnies exploitantes. Mais les choses ont volu progressivement avec la croissance exponentielle des flottes des compagnies ariennes. Ces dernires dailleurs ont dcid progressivement que leur cur de mtier tait le transport de passagers ou de marchandises et que la maintenance de leurs appareils, leur rvision et incidemment lorsque ncessaire leur rparation devaient tre confies des spcialistes. Ce qui a donn lieu lmergence de tout un tissu industriel notamment dans la rparation de pices de moteurs. Et pour saffranchir de la gestion directe de cette charge que reprsente la MRO, nombreuses sont les compagnies qui ont cr des divisions spcifiques qui dans bien des cas ont t filialises.

Le groupe Deutsche Lufthansa a franchi le pas en 1994 avec la cration de Lufthansa Technik, Singapore avec ST Aerospace, British Airways Engineering a t constitue en 1974 lors de la fusion des deux compagnies BOAC et BEA et qui fait donc partie intgrante aujourdhui du groupe IAG (British Airways, Vueling et Iberia), etc. On note une particularit : Air France (et dornavant le groupe Air France KLM) na pas filialis ses activits de maintenance. Elles sont restes loges dans une division qui bien videmment sest toffe lorsque le groupe AF KLM a t constitu. Et cela pour ne citer que quelques exemples lchelle europenne lheure o sachve Londres la convention-exposition MRO Europe. Mais ce modle conomique de filialisation ou dexternalisation a connu aussi son pendant aux Etats-Unis qui restent encore lheure actuelle (il suffit de regarder le nombre davions commerciaux en exploitation dans cette zone) le plus gros demandeur en terme de maintenance.

Recentrage des compagnies ariennes sur leur cur de mtier. Cration non seulement dunits spcifiques pour la maintenance, constitution dentreprises non affilies aux compagnies ariennes, la MRO a connu une grande priode dexpansion. Et cela nest pas prt de sarrter si lon en crot les dernires prvisions que les analystes ont prsent MRO Europe cette semaine. Ainsi, ICF International estime que le chiffre daffaires mondial de la MRO qui stablissait quelque 62 milliards de dollars en 2014 devrait atteindre dans 10 ans les 90 milliards. Une manne que les constructeurs nont pas choisi de laisser aux seuls oprateurs et ateliers de maintenance. Et cela depuis pas mal dannes.

Ce qui est notamment vrai dans le secteur des moteurs et des quipements. La raison en est la suivante : les avionneurs – tout le prouve – font pression sur leurs fournisseurs afin de diminuer leurs prix. Un des premiers groupes avoir compris ce qui allait advenir – et il fut grandement critiqu par ses concurrents – fut le motoriste britannique Rolls-Royce accus de solder , voire donner ses moteurs aux compagnies ariennes sous couvert de contrats de maintenance qui a fait ses beaux jours. Car pour RR lactivit MRO a reprsent jusqu 60 % de son chiffre daffaires et elle atteignait encore 52 % en 2014. De leur ct General Electric et Pratt & Whitney ont men une stratgie de consolidation du march en liminant petit petit les acteurs indpendants, devenant des mastodontes du secteur. Et dans ce domaine, Snecma, le partenaire de GE Aviation dans la coentreprise CFM International sest ralli GE pour offrir au march une offre globale de MRO pour les deux familles de moteurs quelle produit : les clbres CFM56 (qui motorisent les Boeing 737 et une partie de la flotte des Airbus A320) mais aussi les tout nouveaux Leap destins aux versions remotorises de ces mmes appareils.

Cette stratgie des motoristes a dailleurs eu pour consquence de retarder la signature du contrat dacquisition dAirbus A350 XWB par Air France KLM. En effet, AF KLM qui a dvelopp notamment avec GE pour la MRO des moteurs GE90- des comptences incontestes dans la rparation moteur, a souhait piloter elle-mme la MRO des moteurs des A350XWB dont lunique motoriste nest autre que Rolls-Royce qui ne tenait pas, bien videmment, ouvrir une brche dans son business.

La situation nest gure diffrente du ct des quipementiers qui voient dans la MRO de leurs propres produits une activit de nature lisser les alas du march de la premire monte.

Car si la socit de conseil ID Aero rappelle au gr de ses tudes sur le trafic arien (le MTR : Monthly Traffic Report) que les cadences de livraison vont continuer crotre, elle insiste sur le fait que cette croissance connatra sinon des creux comme ce fut le cas aprs les vnements tragiques du 11 septembre 2001, mais pour le moins des paliers comme en 2008/2009. Des creux ou paliers durant lesquels les fournisseurs (non seulement les motoristes mais aussi les quipements et les arostructuriers) devront tre en mesure de maintenir, sinon compenser, lactivit OEM rduite par une activit MRO.

Quel que soit le secteur et la taille des entreprises, ces activits de maintenance constituent un ballon doxygne que personne nest prt lcher. Alors quelles seront les conclusions de la Commission europenne? Le bras de fer sannonce acharn.

Nicole Beauclair pour AeroMorning

Published inActu